La reconversion professionnelle a séduit de nombreux français durant la crise sanitaire. Pour certains, le confinement a été l’occasion de réévaluer ses priorités, et de se lancer dans une carrière plus épanouissante et alignée avec ses valeurs.
Mais pour beaucoup, la reconversion professionnelle a surtout été une nécessité. Cela a notamment été le cas pour les professionnels de la restauration, dont l’activité a été mise à l’arrêt pendant de longs mois.
Si la nouveauté fait souvent envie, elle n’est pas toujours synonyme d’une carrière professionnelle plus gratifiante. Selon une récente étude réalisée par le cabinet UKG, 62 % des personnes qui ont changé de travail durant la pandémie regrettent leur décision, s’estimant plus satisfaits dans leur ancienne activité.
Pourquoi une telle déception, et comment amorcer son retour dans la restauration lorsque l’on a tout quitté ? Voici quelques éléments de réponse…
Reconversion : 62 % des français regrettent d’avoir quitté leur travail pendant la pandémie
Les déçus de la reconversion représentent plus de la moitié des français qui ont décidé de changer de métier pendant la pandémie. Parmi eux, ils sont 25 % à regretter leur ancienne mission et leur ancien salaire. Un taux bien plus important que dans les autres pays européens dans lesquels le cabinet UKG a réalisé son étude. A titre de comparaison, ils sont seulement 39 % en Allemagne et 34 % aux Pays-Bas.
Résultat, près de la moitié des reconvertis français ont changé une seconde fois de secteur durant cette période. Là encore, les chiffres sont deux fois plus importants que dans les autres pays sondés.
Alors pourquoi un tel désenchantement ?
Passé l’excitation de la nouveauté, nombreux sont les convertis à déchanter face à la réalité de leur nouveau métier. Dans un entretien publié dans le magazine les Echos, Xavier, passé de l’industrie agroalimentaire à la boucherie, évoque ses difficultés à s’adapter à un nouvel environnement et à de nouveaux horaires de travail.
Nouveaux standards de réussite
Après plusieurs mois difficiles, il décide finalement de retourner dans son entreprise. Avec le recul, il considère que sa reconversion n’a pas été motivée par les bonnes raisons.
Poussé par une quête de sens qui se matérialise de plus en plus dans la vie professionnelle, les français sont en effet nombreux à voir comme un échec de faire toute leur carrière dans le même secteur. Ou, pire encore, au même poste. Les changements de carrière, même les plus radicaux, sont désormais valorisés. Et la crise sanitaire n’a fait qu’accentuer ce phénomène, en poussant de nombreux actifs à l’introspection.
Mais qui dit nouveau métier, dit aussi nouvelles compétences et standards de réussite. Des standards auxquels les reconvertis ne se sont pas toujours très bien préparés. Xavier avoue ainsi avoir opté pour la boucherie, séduit par le mythe du travail manuel.
Mais les mythes collent rarement avec la réalité.
Encore mal accompagnés (et pas toujours soutenus par leurs proches), les reconvertis peinent souvent à se faire une place dans leur nouveau travail. Plus globalement, ils sont nombreux à penser que le changement se fait en un claquement de doigts, alors même que le cheminement psychologique peut être souvent éprouvant.
C’est d’autant plus vrai pour ceux qui font le choix de l'entrepreneuriat, un statut que l’on a tendance à mettre sur un piédestal. Monter son propre commerce ou sa propre entreprise ne représente pas uniquement un défi excitant, et la possibilité de retrouver sa liberté. C’est aussi beaucoup d’administratif, devoir gérer le stress de revenus fluctuants, et surtout tenir le rôle de chef d’équipe.
Ne pas se précipiter et mettre à jour ses compétences
Lorsqu’est annoncé le premier confinement, Julie a 33 ans, et 5 années d’expérience dans la restauration. Dans un entretien avec Welcome to The Jungle, elle revient sur les allers-retours qu’elle a fait depuis entre son poste de chef de rang et la communication de crise. Une reconversion accélérée par la mise à l’arrêt des métiers de l’hôtellerie et de la restauration, mais qui s’est surtout révélée plus compliquée qu’elle ne l’aurait pensé.
Sans expérience dans ce nouveau domaine, ses candidatures restent lettre morte. D’un autre côté, les offres en restauration commencent à reprendre et elles, elles ne manquent pas. Julie finit par replonger et retrouve les conditions de travail qu’elle avait voulu fuir. Mais aussi les bons côtés qui l'avaient attiré vers les métiers de service, notamment le contact avec les clients ainsi que la solidarité avec ses équipes.
Comme elle, 28 % des reconvertis déclarent en effet regretter leurs anciens collègues. C’est d’autant plus vrai dans un secteur profondément humain comme la restauration. Mais aussi pour ces métiers à vocation, qui malgré les contraintes et les difficultés, restent pour beaucoup de personnes qui les exercent une véritable passion et non pas uniquement un travail.
Alors quelle est la bonne solution lorsque l’on songe à se reconvertir ? Et comment déterminer s’il s’agit d’un bon choix pour sa carrière ?
Les professionnels de la reconversion conseillent tous de ne pas se précipiter et de ne pas lâcher son travail du jour au lendemain. Changer de secteur n’est pas anodin. Et la meilleure solution pour éviter les désillusions, c’est de bien évaluer les risques et de prévoir des filets de secours.
Ce temps de réflexion permettra également à ceux et celles qui seraient tentés par le changement de déterminer si la meilleure voie est bien la reconversion. Ou si des ajustements dans leur travail actuel ne seraient pas suffisants. Pour les professionnels de la restauration refroidis par les horaires décalés ou le déséquilibre trop grand entre vie pro et perso, passer à son compte et pouvoir choisir ses missions peut être un bon moyen de retrouver sa liberté. En s’inscrivant sur Brigad, ils peuvent aussi changer régulièrement d’établissements, et ainsi éviter la monotonie tout en continuant de se dédier à leur passion.
Des efforts structurels pour réattirer les déçus de la conversion
Après deux années difficiles, la restauration semble enfin sortir la tête de l’eau.
Selon l'analyse de Food Service Vision, c’est la première fois depuis le début de la crise sanitaire qu’elle progresse en valeur (7 % le mois dernier pour la restauration commerciale). Cette reprise d’activité, qui s’explique par le retour des français au restaurant et l’arrivée des beaux jours, ne doit néanmoins pas faire oublier les problèmes structurels qui persistent dans le secteur.
L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie estime à 100 000 le nombre d’emplois non pourvus. Et les départs restent à la hausse (entre de 20 % et 50 % d’entrées en moins). Pour inverser la tendance, des changements structurels devront être entrepris, notamment pour réévaluer le salaire des cuisiniers comme des serveurs, qui restent en dessous du salaire médian au niveau national.